vendredi 28 février 2014

Le discours de Lupita Nyong’o lors de "Black Women In Hollywood" de Essence magazine

L’actrice nommée à l'Oscar de la meilleure actrice dans un second rôle pour 12 Years A Slave de Steve McQueen, était hier récompensée lors de la cérémonie Black Woman In Hollywood organisée par le magazine Essence. Lupita Nyong’o qui a reçu le prix de la Meilleure révélation féminine, a donné un discours émouvant :
J’ai écrit ce discours et je n’ai pas eu le temps de répéter ce sera donc ma répétition . Merci Alfre , pour une introduction incroyable et pour la célébration de mon travail . Et je vous remercie de m’avoir invité à faire partie d’une communauté aussi extraordinaire . Je suis entourée par des gens qui m’ont inspiré , en particulier les femmes dont la présence à l’écran m’a fait me sentir un peu plus vue, entendue et comprise. Le fait qu’ESSENCE organise cet événement célébrant nos réussites professionnelles de l’année est important, un magazine de beauté qui reconnaît la beauté que nous possédons mais aussi celle que nous créons.
Je veux profiter de cette occasion pour parler de beauté , la beauté noire, la beauté foncée. J’ai reçu une lettre d’une fille et je voudrais partager juste une petite partie avec vous :  » Chère Lupita, Je pense que tu est vraiment chanceuse d’être aussi noire et d’avoir malgré tout ce succès à Hollywood. J’étais sur le point d’acheter la crème Whitenicious de Dencia pour éclaircir ma peau lorsque tu es apparue et m’as sauvé. « 

Mon cœur a saigné quand j’ai lu ces mots , je n’aurais jamais pensé que mon premier emploi après l’école serait si important qu’il ferait de moi une figure d’espoir, de la même manière que les femmes de La Couleur Pourpre l’ont été pour moi .

Je me souviens d’un temps où je ne me sentais pas belle. J’allumais la télé et je ne voyais que des peaux pâles, j’étais taquinée et raillée à cause de ma peau foncée. Et ma seule prière à Dieu, le faiseur de miracles, c’était de me réveiller avec une peau claire. Je me réveillais et j’étais excitée à l’idée de voir ma nouvelle peau, à tel point que je refusais de regarder mon corps jusqu’à ce que je sois en face d’un miroir parce que je voulais voir mon beau visage en premier. Et chaque jour, je vivais la même déception, j’étais aussi sombre que la veille. J’ai essayé de négocier avec Dieu , je lui ai dit que je cesserais de voler des morceaux de sucre la nuit s’il me donnait ce que je voulais , j’obéirais à ma mère et je ne perdrais plus mon pull de l’école s’il me rendait un peu plus claire. Mais je suppose que Dieu n’a pas été impressionné par mes arguments parce qu’il n’a jamais écouté.
Et quand j’étais adolescente, ma haine contre moi même empirait, comme vous pouvez l’imaginer. Ma mère me rappelait souvent qu’elle pensait que j’étais belle mais ce n’était pas le sujet, c’est ma mère, bien sûr qu’elle est censée penser que je suis belle. Et puis … Alek Wek . Un modèle célèbre, elle était sombre comme la nuit, elle était à tous les défilés et dans tous les magazines et tout le monde disait qu’elle était belle . Même Oprah a dit qu’elle était belle et ça en a fait une vérité. Je n’arrivais pas à croire que les gens trouvaient belle une femme qui me ressemblait autant. Mon teint avait toujours été un obstacle et tout d’un coup, Oprah me disait que ça ne l’était pas. J’étais perplexe et je voulais rejeter cette idée parce que que je commençais à apprécier la séduction qu’il y a dans l’inadéquation. Mais quelque chose commençait à grandir en moi, quand j’ai vu Alek, j’ai vu par inadvertance un reflet de moi-même que je ne pouvais pas renier . Alors mon pas a changé parce que je me sentais plus vue, plus appréciée par ceux qui définissent la beauté. Mais autour de moi, pour ceux qui selon moi avaient de l’importance, je n’étais toujours pas belle. Et ma mère à nouveau me disait qu’on ne mange pas la beauté, elle ne vous nourrit pas et ces mots me tourmentaient et me gênaient, je ne les ai pas vraiment compris jusqu’à ce que finalement je réalise que la beauté n’est pas une chose que je pouvais acquérir ou consommer, c’était quelque chose que je devais être .
Et ce que ma mère voulait dire quand elle disait qu’on ne mangeait pas la beauté, c’est que vous ne pouvez pas vous reposer sur votre beauté pour avancer. Ce qui est fondamentalement beau c’est votre compassion envers vous et pour ceux qui vous entourent . Ce genre de beauté enflamme le cœur et enchante l’âme . C’est ce qui cause à Patsey tant de problèmes avec son maître, mais c’est aussi ce qui a fait vivre son histoire jusqu’aujourd’hui. Nous nous souvenons de la beauté de son esprit, même après que sa beauté physique ait disparu .
J’espère donc que ma présence sur vos écrans et dans les magazines peut vous conduire, chères jeunes filles, vers un parcours similaire . Que vous ressentirez la validation de votre beauté extérieure, et que vous travaillerez sur votre beauté intérieure.
Il n’y a pas de honte dans la beauté noire.
Le discours en anglais :
I wrote down this speech that I had no time to practice so this will be the practicing session.

Thank you Alfre, for such an amazing, amazing introduction and celebration of my work. And thank you very much for inviting me to be a part of such an extraordinary community. 
I am surrounded by people who have inspired me, women in particular whose presence on screen made me feel a little more seen and heard and understood. That it is ESSENCE that holds this event celebrating our professional gains of the year is significant, a beauty magazine that recognizes the beauty that we not just possess but also produce. 
I want to take this opportunity to talk about beauty, Black beauty, dark beauty. I received a letter from a girl and I’d like to share just a small part of it with you: “Dear Lupita,” it reads, “I think you’re really lucky to be this Black but yet this successful in Hollywood overnight. I was just about to buy Dencia’s Whitenicious cream to lighten my skin when you appeared on the world map and saved me.” 
My heart bled a little when I read those words, I could never have guessed that my first job out of school would be so powerful in and of itself and that it would propel me to be such an image of hope in the same way that the women of The Color Purple were to me.

I remember a time when I too felt unbeautiful. I put on the TV and only saw pale skin, I got teased and taunted about my night-shaded skin. And my one prayer to God, the miracle worker, was that I would wake up lighter-skinned. The morning would come and I would be so excited about seeing my new skin that I would refuse to look down at myself until I was in front of a mirror because I wanted to see my fair face first. And every day I experienced the same disappointment of being just as dark as I was the day before. I tried to negotiate with God, I told him I would stop stealing sugar cubes at night if he gave me what I wanted, I would listen to my mother’s every word and never lose my school sweater again if he just made me a little lighter. But I guess God was unimpressed with my bargaining chips because He never listened. 
And when I was a teenager my self-hate grew worse, as you can imagine happens with adolescence. My mother reminded me often that she thought that I was beautiful but that was no conservation, she’s my mother, of course she’s supposed to think I am beautiful. And then…Alek Wek. A celebrated model, she was dark as night, she was on all of the runways and in every magazine and everyone was talking about how beautiful she was. Even Oprah called her beautiful and that made it a fact. I couldn’t believe that people were embracing a woman who looked so much like me, as beautiful. My complexion had always been an obstacle to overcome and all of a sudden Oprah was telling me it wasn’t. It was perplexing and I wanted to reject it because I had begun to enjoy the seduction of inadequacy. But a flower couldn’t help but bloom inside of me, when I saw Alek I inadvertently saw a reflection of myself that I could not deny. 
Now, I had a spring in my step because I felt more seen, more appreciated by the far away gatekeepers of beauty. But around me the preference for my skin prevailed, to the courters that I thought mattered I was still unbeautiful. And my mother again would say to me you can’t eat beauty, it doesn’t feed you and these words plagued and bothered me; I didn’t really understand them until finally I realized that beauty was not a thing that I could acquire or consume, it was something that I just had to be. 

And what my mother meant when she said you can’t eat beauty was that you can’t rely on how you look to sustain you. What is fundamentally beautiful is compassion for yourself and for those around you. That kind of beauty enflames the heart and enchants the soul. It is what got Patsey in so much trouble with her master, but it is also what has kept her story alive to this day. We remember the beauty of her spirit even after the beauty of her body has faded away. 
And so I hope that my presence on your screens and in the magazines may lead you, young girl, on a similar journey. That you will feel the validation of your external beauty but also get to the deeper business of being beautiful inside. 
There is no shame in Black beauty.

*Patsey est le personnage incarné par Lupita Nyong’o dans « 12 years a slave ».

Le discours en vidéo ci-dessous :

Source.. 

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